[Cet article fait partie du projet « 31 bonnes résolutions anti-validistes » dévoilé en janvier 2020]

Tout comme il existe des communautés queers, féministes ou racisées, il existe une vraie communauté handi, qui s’exprime de moins en moins timidement pour faire entendre sa voix. Et cette communauté, dont nous faisons partie, a sa propre culture, qu’on appelle la CRIP CULTURE.

Les Etats-Unis et autres pays anglo-saxons sont souvent précurseurs dans le domaine des sciences sociales, et c’est là-bas que sont nées les disability studies (études sur le handicap) dans les années 60.

Le militantisme handi a vu le jour dans les facs américaines à cette même période. De ce mouvement va découler la théorie appelée « modèle social » du handicap, principal socle du positionnement de nos mouvements handis actuels.

Le modèle médical, jusqu’alors dominant, considère le handicap comme l’expérience individuelle d’une défaillance du biologique. Le modèle social, lui, replace le problème au collectif : le handicap découle avant tout de l’inadaptation de nos environnements. Et ça change tout !

En France, c’est le CLH (Comité de Lutte des Handicapés), et leur « journal des handicapés méchants » publié dès 1974, qui vont à leur tour porter ces questions sur la place publique et tenter de casser les stéréotypes autour du handicap.

Malheureusement, le collectif s’arrêtera en 1980, ne laissant place à aucune relève similaire et leur parole reste très peu connue du grand public, mais leur empreinte dans la culture handi française reste précieuse et fondatrice. Merci les frangin·e·s ! <3

Il est important de préciser ici que les théories « queer » (comme la déconstruction des identités, la redéfinition du légitime et de l’illégitime, ou le retournement du stigmate) ont eu un grand impact sur l’étude du handicap et la crip culture.

Le retournement du stigmate, pour une communauté, c’est se réapproprier les mots stigmatisants proférés à son encontre, pour les valoriser et les revendiquer. Comme le mot « pute » pour les travailleuses du sexe. Pour les personnes handicapées, c’est se réapproprier le mot « crip ».

Crip signifie en français « estropié, boiteux, infirme, ou invalide ». C’est un mot extrêmement péjoratif dans la bouche des personnes valides.
Mais pour certaines personnes handicapées, ce mot est devenu un étendard pour revendiquer leurs différences.

D’où la « crip culture », indissociable du « militantisme crip ». En quoi consiste exactement cette crip culture ? Et bien c’est une culture à part entière, avec son histoire, ses luttes, ses héros, ses codes, ses oeuvres, parfois même sa langue.

Si on parle d’une « crip culture », en fait on pourrait aussi bien disséquer cette culture en sous-cultures, tant il existe de communautés avec leurs propres codes au sein des personnes handicapées, comme la culture sourde qui possède une richesse incroyable.

Évidemment, le fait de posséder sa propre langue est une pierre constitutive forte. Mais au-delà, elle assume fièrement son Histoire, ses figures fortes, ses références, organise conventions et festivals, etc.

D’autres ont encore beaucoup à construire, mais toutes ces sous-cultures reposent sur un socle commun. C’est une culture qui questionne les notions de norme, d’identité, de sexualité, de beauté, de performance…

En France, si le militantisme handi commence à émerger, toute la culture qui y est associée est encore bien méconnue.
Pourtant, connaître cette culture, c’est déjà commencer à s’approprier et à revendiquer son handicap comme une composante de son identité.

 

Quelques ressources pour aller plus loin :

Voir sur Twitter : Bonne résolution n°27 : Je découvre l’existence de la crip culture.

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