Nous, Dévalideuses, collectif antivalidiste, appelons à la mobilisation pour envoyer le plus de députés du Nouveau Front Populaire possible à l’assemblée les 30 juin et 7 juillet. Il faut opposer un barrage à l’extrême droite, et au libéralisme mortifère qui menacent des vies, très concrètement. Ce faisant, nous ne sommes pas dupes : nous devons continuer à mettre la pression aux côtés des autres organisations minoritaires pour que les luttes antivalidistes, féministes, antiracistes soient réellement prises en compte dans le projet politique.
Lutter contre l’extrême droite est une question de survie
La dissolution et l’élection d’une nouvelle assemblée nationale intervient dans un contexte politique où les idées d’extrême droite sont extrêmement répandues, banalisées et politiquement installées, notamment grâce aux médias et politiques de droite qui ont soigneusement orchestré la dédiabolisation des partis et personnalités d’extrême-droite.
L’extrême droite élue, c’est, à court terme, une libération des violences racistes, antisémite, islamophobes, et des violences envers les minorités, les queers, les femmes… Dans la rue, au travail, dans les familles, dans tous les lieux de la vie.
L’extrême droite au pouvoir, c’est une politique d’écrasement de celles et ceux qui sont déjà vulnérables et précaires : La solidarité sélective par la préférence nationale, la censure ou la dissolution d’associations antiracistes et de toute association émettant une critique politique, le refus des droits, la mise en danger des personnes migrantes ou sans papier. L’extrême droite au pouvoir, c’est l’attaque des solidarités : SMIC non augmenté, chômage attaqué, pas de retrait de la réforme des retraites.
Les personnes handicapées font partie des cibles du Rassemblement National, qui désigne “les étrangers et les assistés” comme ennemis de la nation :
- pas d’augmentation de l’AAH (les députés RN se sont abstenus lors d’un vote pour l’augmentation en 2018)
- pas de désinstitutionnalisation,
- pas d’école réellement inclusive (refus de créer plus de postes d’AESH, création de centres spéciaux pour élèves “perturbateurs”).
- les personnes handicapées issues de l’immigration seraient exclues des prestations sociales et tout le salaire différé comme le chômage et la retraite seraient conditionnées à cinq ans de vie sur le territoire. (Oui “salaire différé”, ce ne sont pas des aides charitables, les gens cotisent!) [1]Législatives 2024 – Timothée Duverger : « Le programme du RN c’est donner plus à ceux qui ont déjà, moins à ceux qui ont peu »
L’extrême droite au pouvoir, c’est un investissement massif dans le tout sécuritaire, et l’impunité pour les forces de l’ordre. Ce sont plus de violences policières, avec des potentielles séquelles physiques et psychologiques et plus de corps handicapés, comme par exemple de personnes éborgnées comme pendant les manifestations des gilets jaunes, plus d’adolescents tués dans la rue comme Nahel en juin 2023.
L’extrême droite au pouvoir, ce sont des attaques des droits LGBTQIA+, l’IVG plus difficile d’accès, la lutte contre les violences sexistes et sexuelles abandonnées. [2]Basta Mag Au Parlement européen, le RN s’oppose aux droits des femmes et au salaire minimum, 13 mai 2024
Nous, les Dévalideuses, collectif antivalidiste, nous positionnons contre l’extrême droite et ses idées violentes et discriminatoires.
La lutte antivalidiste est une lutte pour la vie digne, pour la justice et la solidarité. La lutte antivalidiste est une lutte pour le droit de chacunE d’être pleinement citoyen, quelque soit sa manière d’être vivant, sa situation psychique ou physique, ses origines.
Nous appelons à la mobilisation pour envoyer le plus de députés du Nouveau Front Populaire possible à l’assemblée. Ce sont les seuls à proposer un programme basé sur la justice, la solidarités et les services publics.
Mais… voter contre l’extrême droite ne suffit pas à combattre ses idées.
Voter aux législatives ne suffit pas : lutter contre les discriminations c’est toute l’année
Ces idées sont portées bien plus largement que par les partis officiellement d’extrême droite : La police et le harcèlement policier dévastent déjà les vies, handicapent les personnes racisées majoritairement. D’après le Défenseur des droits, les jeunes hommes perçus comme noirs ou maghrébins ont 20 fois plus de risques d’être contrôlés par la police que les autres.[3]Amnesty International Violences policières
La loi immigration proposée par le gouvernement d’E. Macron fin 2023, prévoyait de priver les arrivants sur le territoire du droit le plus fondamental, la santé, en supprimant l’Aide Médicale d’Etat, proposition raciste et validiste.
Mais ce que prouve cet amendement qu’il soit adopté ou non, c’est que la xénophobie et le racisme d’État peuvent être et ont toujours été mobilisés au service de politiques validistes et inversement…Elijah Djaé décortique dans son article Loi immigration et suppression de l’AME : la xénophobie et le racisme d’État au service du validisme. [4]Loi immigration et suppression de l’AME : la xénophobie et le racisme d’État au service du validisme. – Elijah Djaé
Les solidarités sont détricotées et attaquées en permanence. Les vies non productives sont déclassées, et institutionnalisées. “93% du territoire français est un désert médical” annonce Thibault Lhonneur, expert pour la Fondation Jean Jaurès, élu dans le Cher. [5]“93% du territoire français est un désert médical”. Thibault Lhonneur, expert pour la Fondation Jean Jaurès, élu LFI dans le Cher. Émission spéciale : face à l’extrême droite, … Continue reading
L’application de la loi de 2005 pour une société accessible est sans cesse repoussée. Les corps sont déjà maltraités, déjà mutilés pour rentrer dans la norme valide, hétérosexuelle, cisgenre, blanche, productive.
Dans ce contexte, lutter contre l’extrême droite c’est bien plus que voter les 7 et les 30 juillet. Lutter contre l’extrême droite c’est se retrouver, s’organiser, se former les uns les autres, rejoindre ou soutenir les collectifs de premiers concernés, relayer leurs travail et leurs outils. Lutter contre l’extrême droite c’est toute l’année, et aussi longtemps que ce sera nécessaire.
Les mis au banc de la société disent la difficulté de se mobiliser, ces voix sont essentielles
Au sein de l’appel à la mobilisation, des voix s’élèvent pour dire la violence de devoir se mobiliser, faire barrage contre l’extrême droite avec les gauches politiques qui semblent pas à la hauteur de nos vies le reste de l’année. Ces voix sont essentielles.
Il est difficile de soutenir le cœur léger une gauche qui a tant à faire pour progresser, pour réellement intégrer les sujets antivalidistes, féministes et antiracistes.
“La base c’est de reconnaître la violence symbolique que c’est de demander aux gens qui sont mis au banc de la société d’aller voter, d’un ton moralisateur.” annonce Féris BARKAT Cofondateur de Banlieues Climat en faisant référence aux quartiers populaires et à la ruralité. [6]Féris BARKAT, Cofondateur de Banlieues Climat interroge la représentativité des personnes engagées dans les quartiers populaires au sein des candidats dans C’est Ce Soir, du 13 juin 2024
Du côté des luttes antivalidisites, tout récemment, la Loi fin de vie a été discutée sans aucune perspective anti-validiste par des “progressistes”. Le débat a donné lieu à des propos très eugénistes. Les personnes handicapées s’en sont pris plein la figure.
C’est particulier d’attendre de quelqu’un d’aller voter pour des gens qui l’écrabouillent à longueur d’année. Récemment le débat public sur la fin de vie a été pétri d’eugénisme envers les handis. […] Le contrat social est rompu pour moi depuis longtemps. Par exemple en tant que personne psychiatrisée, ma parole ne vaut rien si demain je porte plainte pour n’importe quel fait de viol, harlèlement. écrit Treize, rappeuse et autrice du livre Charge (2023), “en situation de handicap psychique” selon ses mots, sur son compte instagram en juin 2024.
A lire aussi : Une « mort digne », mais pour qui ? Approche anti-validiste de la loi fin de vie – Les Dévalideuses sur le Blog de Médiapart
Il est douloureux de participer à un système de gouvernance du pays qui méprise ses minorités, se base sur des institutions intrinsèquement dysfonctionnelles.
Nous soutenons l’appel à la mobilisation pour faire gagner le Nouveau Front Populaire et simultanément, nous avons des comptes à demander
Notre rôle, le rôle de la « société civile organisée » comme ils disent, c’est d’être des aiguillons. Nous devons servir de corde de rappel pour obliger les représentants politiques à intégrer nos vies minorisées à leur projet.
Inès Seddiki, fondatrice de Ghett’up et Cécile Duflot, directrice générale Oxfam France, disent bien que la société civile doit mettre la pression sur les responsables politiques qui se disent de gauche. Concernant les candidatures, le programme, et ensuite la mise en œuvre. “On se donne rendez vous tous les mois !” dit Cécile Duflot. [7]Inès Seddiki, fondatrice de Ghett’up et Cécile Duflot, directrice générale Oxfam France, Émission spéciale : face à l’extrême droite, l’urgence de la mobilisation de la société … Continue reading
C’est le moment de faire Front Populaire, de se mobiliser mais c’est le moment aussi d’être exigeant envers les candidat.e.s, envers les programmes !
Sous prétexte de l’urgence il faudrait faire front unique sans un mot plus haut que l’autre ? C’est l’inverse. C’est le moment idéal pour faire son autocritique antiraciste, pour travailler sur les racines des violences contre lesquelles on veut se battre.
Exigeons la reconnaissance des combats des premiers concernés.
En féministe, nous demandons la reconnaissance des violences sexuelles validistes dans leur spécificité, avec le constat que ces violences sont permises par l’institutionnalisation des personnes handicapées, et par la dépossession de droits que produit le validisme. Cela va de même pour la reconnaissance des violences sexuelles à caractère racistes dans leur spécificité (comme l’agression Patriarcale antisémite de la jeune fille juive à Courbevoie en juin 2024).
Nous demandons l’accessibilité réelle de la vie en société pour toustes, et pour cela que tous les travaux d’accessibilité soient réalisés et que la loi de 2005 cesse de faire l’objet de reports.
Nous demandons le droit garanti à la vie autonome.Pour ce faire, nous demandons la mise en oeuvre d’une réelle politique de désinstitutionnalisation, et la revalorisations des professions du soin, de l’aide à domicile et du care, au sens large, qui sont essentiels et souvent reposent sur des femmes racisées.
Nous demandons l’intégration des luttes antivalidistes dans les projets politiques. Le mot validisme n’est pas encore au programme. De même, les luttes antiracistes, féministes doivent être pleinement adressées, et que les premierEs concernéEs soient impliqués dans les processus de décision les concernant.
Nous, collectifs en lutte contre les oppressions, continurons à progresser, à travailler, pour être les laboratoires des progrès sociaux. Et nous continuerons à trouver des manières de nous faire entendre, pour que les responsables politiques prennent nos vies en compte.
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